D’une manière ou d’une autre, il faut être à Cordes au petit matin pour voir la cité s’illuminer doucement. Ou tard le soir, quand le soleil disparaît derrière les collines en même temps que les derniers promeneurs. Par temps clair de préférence, mais les matins brumeux ont aussi leur charme. Cordes-sur-Ciel est un lieu hors du temps, qui s’apprécie en somme à toute heure du jour et en toute saison. En cause, sa situation audacieuse en belvédère au-dessus des nuages, ses palais gothiques et ses jardins minuscules, ses portes puissantes, ses escaliers dérobés. Au fil d’une ascension sportive, l’architecture plonge le visiteur dans 800 ans d’histoire : la naissance de Cordes en 1222 en pleine croisade contre les Albigeois, l’âge d’or des XIIIe et XIVe siècles, le déclin, puis le renouveau au XXe siècle. Matinale et motivée, je suis au cœur de la cité avant l’arrivée des foules qui comme moi se presseront bientôt pour admirer cet héritage patrimonial exceptionnellement conservé. La matinée n’est pas de trop pour explorer les ruelles, s’attarder dans les échoppes des artistes et des artisans du cuir, du bois ou des émaux.
Parmi les passages obligés figure aussi la boutique d’Yves Thuriès, artisan chocolatier fameux qui dans les années 1980 contribua à la redynamisation de la cité. Au pied de la bastide, le spectacle hypnotique d’un souffleur de verre à l’œuvre me retient encore un peu. En quête de nouvelles pépites architecturales et paysagères, je me lance sur les routes ondoyantes du pays cordais.
Au cœur de ce pays viticole, une visite chez un vigneron s’impose. Au château de Mayragues, c’est une vigneronne qui me raconte, en me faisant goûter ses vins, le projet fou de se lancer, il y a plus de trente ans avec son mari écossais dans la rénovation de ce château aux proportions imposantes, en même temps que dans la culture de la vigne en biodynamie, à une époque où les influences du calendrier lunaire faisaient doucement rigoler. Au terme de ma journée, je suis sur le chemin de ronde de Castelnau-de-Montmiral, d’où j’observe la forêt de Grésigne, une des plus vastes chênaies d’Europe. Je suis sous le charme des rues tranquilles, des pas-de-porte fleuris, de la place cernée de façades à colombages. Tandis que la lumière décline, je m’attable sous les arcades au Ménagier, restaurant réputé pour sa carte maîtrisée.
J’entame une nouvelle journée par une randonnée sur le sentier du patrimoine, au pied du village de Puycelsi. Le premier tronçon serpente au milieu du verger du Conservatoire – qui sauvegarde et valorise près de 900 espèces fruitières et de vignes anciennes ! -, avant de se perdre dans la forêt de Grésigne. Soit 12 km de boucle pour les plus motivés ! À l’automne, on y vient pour écouter le brame du cerf selon la formule : une marche nocturne, suivi d’un repas campagnard.
Au terme de ma balade, la récompense prend la forme d’une goûteuse assiette aux saveurs locales servie sur la place de l’Ancien-Château. D’ici, la vue sur le paysage est superbe. Mon après-midi se partage entre la visite de Penne avec son château en nid d’aigle bâtit au-dessus des gorges de l’Aveyron, et de Bruniquel, ses rues escarpées, ses échoppes, ses salons de thé et ses deux châteaux, vestiges d’une vieille querelle de famille.
Le chemin du retour emprunte les routes du vignoble de Gaillac. Au domaine du Moulin Hirissou, je constate toute la richesse de sa palette due à une grande diversité de terroirs. J’opte finalement pour un vin blanc doux qui, sans doute, accompagnera à merveille le délicat goût d’amande grillée des croquants de Cordes glissés le jour d’avant dans mon bagage.
Le château-musée du Cayla
Niché au cœur d’une vallée sauvage, le château-musée du Cayla est une maison-paysage, source d’inspiration pour les poètes et écrivains romantiques Maurice et Eugénie de Guérin.
Infos pratiques :
Le château de Salettes, Cahuzac-sur-Vère
À la fois domaine viticole et hôtel de charme, le château de Salettes
est aussi un restaurant gastronomique où l’on déguste le midi (week-end compris) un menu « retour de marché » à prix serré.
chateaudesalettes.com
Le Ménagier, Castelnau-de-Montmiral
Une des très bonnes tables de la région, installée sous les superbes couverts de la place du village.
lemenagier.com
Au Cabanon de Puycelsi
Ouvert du printemps à l’automne, le Cabanon sert une cuisine fusion, mélange de gastronomie locale et de saveurs inspirées par les voyages du chef.
aucabanon.fr
Le domaine du Moulin Hirissou, Gaillac
À cheval sur les deux terroirs gaillacois, le domaine familial produit des vins AOC Gaillac et IGP Côtes-du-Tarn, en version rouges, blancs secs et doux, et rosés.
ledomainedumoulin.com
Le château de Mayragues, Castelnau-de-Montmiral
chateau-de-mayragues.com
Maison Bruyères, Lagrave
Depuis plus de cinquante ans, la biscuiterie familiale commercialise une large gamme de produits sucrés et salés, dont les fameux croquants de Cordes. Visite gratuite, sur rendez-vous.
maisonbruyere.fr
Le château-musée du Cayla, Andillac
Entourée d’un parc classé, cette maison d’écrivains livre un émouvant témoignage de la vie rurale d’une famille noble au XIXe siècle.
musees-departementaux.tarn.fr
La Maison du Verger – Conservatoire d’espèces anciennes, Puycelsi
Vente sur place de fruits frais, jus naturels et produits issus des collections du verger.
05 63 33 19 41.