Les mains dans le pétrin depuis sept générations

D’une simple pâtisserie créée en 1836 au cœur du village de Martres-Tolosane en Haute-Garonne, la Maison Vital Ainé est devenue une entreprise de cinquante salariés proposant une soixantaine de biscuits et gâteaux, toujours fabriqués selon le savoir-faire ancestral transmis de génération en génération.

Pascal Rami, co-dirigeant de la maison Vital Aimé

Il y a 183 ans, Jacques Vital, artisan pâtissier de son état, n’aurait sûrement jamais imaginé qu’en 2019, une entreprise de biscuiterie, fleuron de la vie économique de Martres-Tolosane, porterait toujours son nom. Gageons qu’il n’aurait pas rêvé mieux.

Ironie du sort, ce succès est la conséquence d’une brouille au sein d’une fratrie. C’est du moins ce que raconte la légende familiale, rapportée par Pascal Rami, actuel co-dirigeant de l’entreprise avec sa cousine Bénédicte Vital. « À l’origine, deux frères Vital avaient ouvert une pâtisserie ensemble. Mais comme ils ne s’entendaient pas, chacun a ensuite monté sa propre boutique. Celle du cadet n’a pas marché et a disparu. La pâtisserie qui a perduré est celle de l’aîné, d’où le nom Vital Ainé. » Plus personne ne connaît aujourd’hui la raison de la mésentente des deux frères. Mais tout le monde sait que c’est Jacques Vital et sa femme Jeanne-Marie, tous deux enfants du pays, qui ont fait la renommée de la maison Vital Ainé. « Nous sommes issus d’une vieille famille de Martres-Tolosane » souligne Pascal Rami. « La pâtisserie était installée au centre du village, au rez-de-chaussée de la maison d’habitation. À l’époque, vies professionnelle et personnelle se confondaient. »

En 2000 – date symbolique d’entrée dans le XXIe siècle -, l’entreprise a déménagé dans des locaux plus adaptés mais le siège initial de Vital Ainé est resté dans la famille : les parents de Pascal y habitent toujours.

 

Papier de soie et boîtes en fer

Dans les années suivant sa création, la pâtisserie Vital Ainé s’oriente petit à petit vers la biscuiterie avec notamment une déclinaison du biscuit rose de Reims, un biscuit à la cuiller logiquement baptisé « biscuit de Martres » – première recette et premier succès de la maison – et son cousin le « biscuit commingeois ».

« Au début du XXe siècle, ces biscuits étaient emballés dans du papier de soie et placés dans des boîtes en fer qui étaient livrées aux magasins de détail dans des estafettes », relate Pascal Rami. Dans les locaux actuels de l’entreprise, un grand cadre photo rappelle cette histoire : on y voit la fratrie Vital – les descendants de Jacques – poser fièrement devant une voiture de livraison de l’époque.

Bien d’autres produits emblématiques de la maison Vital Ainé sont issus de recettes anciennes. « La meringue fait partie de notre ADN », détaille le co-dirigeant. « Quand il doit séparer les jaunes d’œuf des blancs pour réaliser certains gâteaux, tout pâtissier qui se respecte fait forcément de la meringue avec les excédents de blancs d’œuf. » Autre poids lourd du catalogue : le cake. « Nous avons une gamme très large de gâteaux à partager, elle compte une vingtaine de références », s’enorgueillit Pascal Rami. « Cela nous arrive régulièrement de revisiter nos origines et de remettre des produits oubliés au goût du jour pour les faire découvrir à nos clients. Il n’y a pas très longtemps, nous avons repris le pain de Gênes, une vieille recette pâtissière que l’on peut d’ailleurs retrouver dans le Larousse de la gastronomie. »

De l’après-guerre aux années 2000

Après la Seconde Guerre mondiale, l’entreprise est dirigée par Louis Vital, grand-père de Bénédicte, et Jean Vital, grand-père de Pascal. « Bertrand, le fils de Louis, a ensuite rejoint son père et son oncle avant de reprendre complètement les rênes de l’entreprise », explique Pascal Rami. Précurseur, Bertrand Vital lance dès 1989 une gamme bio qui rassemble aujourd’hui une douzaine de produits commercialisés dans les magasins spécialisés. À 79 ans, il est toujours président de la maison Vital Ainé. « Il vient tous les jours à l’entreprise parce qu’il adore ça. C’est le patriarche, celui qui nous relie à notre histoire. Cela fait une vingtaine d’années que nous travaillons tous les trois ensemble et nous sommes passionnés par ce que nous faisons. » Pourtant, l’actuel co-directeur général avait à la base d’autres projets professionnels. « Rien ne me prédestinait à revenir dans l’entreprise familiale, je ne l’imaginais pas du tout. J’avais une maîtrise de gestion et un master de finance, je travaillais dans une grande entreprise à Toulouse. Je suis arrivé un peu par hasard pour remplacer mon grand-père tombé malade et je me suis piqué au jeu ! »

 

Méthodes traditionnelles et ingrédients nobles

Procédé de fabrication artisanal, ingrédients de qualité, fournisseurs locaux dès que c’est possible : telle est la formule du succès des produits Vital Ainé. « On pourrait presque dire que c’est du fait maison », revendique M. Rami. « Nous achetons des œufs coquille que nous cassons tous les jours dans notre atelier. Je crois que nous sommes les seuls biscuitiers en France à le faire encore. En général, les autres biscuiteries achètent des œufs déjà cassés et pasteurisés. C’est comme comparer le camembert au lait cru et au lait pasteurisé : ce n’est pas le même produit. De plus, chez nous, tous les ingrédients sont pesés à la main et toutes les pâtes sont chauffées, ce qui est très important. » La maison est très attentive à la provenance des produits : les œufs viennent de Toulouse, la farine du Gers, du Lauragais et de l’Ariège, les fruits cultivés dans la région sont achetés en proximité. « Nous utilisons un pétrin comme le pâtissier de votre quartier », ajoute Pascal Rami. « Sauf qu’au lieu d’avoir un seul pétrin, nous en avons une douzaine. »

Les technologies modernes ont en revanche permis d’optimiser les étapes de moulage, cuisson et conditionnement : celles-ci sont mécanisées, voire robotisées. « Quand j’ai commencé à travailler il y a une vingtaine d’années, on enfournait, défournait et emballait les produits à la main, ce qui ne donne pas un meilleur produit. Nous avons évolué tout en conservant notre valeur ajoutée qui réside dans nos recettes et nos secrets de fabrication. »

Tournés vers l’avenir

La petite entreprise a bien grandi ces vingt dernières années. « En 1998, quand nous sommes arrivés Bénédicte et moi, la maison Vital Ainé employait une dizaine de personnes et faisait 800 000 € de chiffre d’affaires », se souvient M. Rami. « En 2018, avec 50 salariés, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 5 millions d’euros. »

La commercialisation en grande distribution a permis d’augmenter les ventes et les volumes produits. De nouveaux locaux ont été créés, agrandis ensuite à deux reprises.

Aujourd’hui, on trouve les biscuits et gâteaux Vital Ainé dans des supermarchés de tout le grand Sud, de Bordeaux jusqu’à Nice, mais aussi à Paris.

Comme il ne faut jamais se reposer sur ses madeleines, des projets de développement sont en cours. « Nous avons investi dans une ligne de conditionnement pour proposer nos produits en version  » snacking  » et nous positionner ainsi sur les circuits de la restauration collective et la distribution automatique », argumente le co-dirigeant.

Enthousiaste et visiblement heureux dans son travail, Pascal Rami estime que sa cousine Bénédicte et lui ont vécu jusqu’à présent une aventure fantastique et un parcours professionnel très enrichissant tout en restant enracinés à Martres-Tolosane et en faisant perdurer le nom de l’entreprise familiale, sans rien renier de leurs valeurs.

Nous étions impatients d’être « Sud de France » !

« Cela fait plus de 180 ans que nous sommes installés dans le même village, cela avait donc vraiment du sens pour nous de bénéficier de ce label régional ! Nous avons adhéré à Sud de France en 2016, dès que cela a été possible après la fusion des anciennes régions. En France, il y a très peu de marques régionales aussi connues. Sud de France a une aura, c’est un label de qualité pour les produits. Grâce à la notoriété de la marque, aux équipes qui en font la promotion de manière extrêmement dynamique et aux nombreux événements où nos produits sont mis en valeur, nous avons gagné en visibilité. »

Pascal Rami, co-dirigeant de la maison Vital Ainé

Infos pratiques :

Maison Vital Ainé
Chemin de Moulies
31220 Martres-Tolosane
Tél : 05 61 98 80 05
www.vital-aine.com